Dans la zone sahélienne au Burkina Faso, les sols sont pauvres, mal protégés par une végétation clairsemée et ont tendance à s’éroder sous l’effet des pluies de mousson. La pression démographique, la diminution du temps de jachère, le surpâturage et les effets des dérèglements climatiques ont conduit, au fil du temps, à une dégradation critique des sols. Avec pour conséquence une baisse considérable des rendements entraînant des situations d’insécurité alimentaire.
La mise en place de périmètres bocagers
Face à une agriculture en crise et pour résoudre les problèmes de dégradation du milieu écologique sahélien, l’ONG Terre Verte promeut et soutient depuis 1989 le développement de périmètres bocagers, au travers d’associations inter-villageoises et de leurs fermes pilotes.
« Certains paysans pratiquent l’agroécologie de façon parsemée, mais au niveau des fermes pilotes nous avons développé une solution qui est d’intégrer tous les aspects de l’agroécologie en un seul lieu que nous appelons périmètre bocager », explique Seydou Kaboré, directeur de la ferme pilote du village de Guié.
Regard extérieur
En 2019, Terre Verte et l’Association intervillageoise Zoramb Naagtaaba (AZN) ont souhaité qu’un regard extérieur soit porté sur leur expérience longue de trente ans. Il s’agit, en d’autres mots, d’évaluer les effets des pratiques et des systèmes agroécologiques et de dégager des enseignements. C’est dans ce contexte que s’inscrit le projet Bocage sahélien en partage[1], mené en partenariat avec le Gret, l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et l’association La Trame. Le Gret se charge du volet socio-économique de l’étude et l’IRD de celui de la santé des sols. En parallèle, La Trame et les Paysans sahéliens documentaristes du Ciné Yam réalisent un film documentaire pour rendre compte de la richesse des enseignements des périmètres bocagers et présenter les principales conclusions des études menées par le Gret et par l’IRD.
L’importance d’évaluer les effets de l’agroécologie
Dans le cadre du projet, le Gret réalise deux études. La première a pour objectif d’apprécier les effets socio-économiques des pratiques et des systèmes agroécologiques à l’intérieur mais aussi à l’extérieur de trois périmètres bocagers des villages de Guiè et de Douré, situés dans la région du Plateau-Central. L’étude analyse également les conditions de développement de la mise en œuvre de ces pratiques et systèmes.
La seconde étude, sous forme de capitalisation, permet de dégager les enseignements de l’aménagement et du fonctionnement de ces trois périmètres bocagers. Elle vise notamment à contribuer au changement d’échelle de la transition agroécologique en alimentant les réflexions d’autres acteurs du développement, y compris des pouvoirs publics, pour la mise en place d’une politique publique ambitieuse en faveur de l’agroécologie.
Pour Laurent Levard, agroéconomiste au Gret et co-auteur des études, « beaucoup d’ONG et d’autres acteurs mettent en œuvre des projets de développement de l’agroécologie. On sait que cela donne des résultats, notamment là où les sols sont dégradés. Mais on manque d’évaluations systématiques, qui permettent de comparer les différentes expériences et de mieux comprendre ce qui fait que certains paysans mettent en place des pratiques agroécologiques, et d’autres non ».
« Le souci majeur qui freine le plaidoyer, c’est le manque de données : nous n’arrivons pas à montrer en quoi l’agroécologie peut contribuer à répondre aux grands défis qui se posent à nos sociétés », ajoute Manéré Ouedraogo, chargé d’étude au Gret et co-auteur des travaux.
Les deux études menées contribuent à pallier ces manques. Elles s’inscrivent d’ailleurs dans le cadre plus large des activités relatives à l’évaluation de l’agroécologie menées par le Groupe pour les transitions agroécologiques (GTAE)[2] et ses partenaires scientifiques (Agroparistech, Cirad, IRD et Institut Agro Montpellier).
Lire le rapport d’évaluation du Gret : Evaluation de l’agroécologie dans les villages de Guiè et Douré
Lire la capitalisation du Gret : L’expérience des périmètres bocagers de Guiè et Douré
Visionner le documentaire Bocage Sahélien en Partage réalisé par La Trame et le Ciné Yam :
Les citations contenues dans cet article sont extraites du documentaire Le Bocage Sahélien en Partage.
[1] Le projet Bocage sahélien en partage est mis en œuvre dans le cadre du Programme Agroécologie (PAE) de la CEDEAO et avec le soutien financier de l’Agence française de développement (AFD).
[2] Agrisud International, AVSF, Cari et Gret.
