09 février 2022
Ressources naturelles Changement climatique Communs Eau Sénégal

Gestion de l’eau et changement climatique – dynamique en cours dans la zone des Niayes au Sénégal

Actualité

Depuis 2017, l’ONG Gret accompagne la Direction de la Gestion et de la Planification des ressources en eau du Sénégal (GGPRE) et les acteurs communaux pour la prise en compte d’une gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) face aux effets du changement climatique dans la zone des Niayes.

Des menaces sérieuses sur les ressources en eau aux conséquences sociales graves

La zone des Niayes correspond à la frange littorale située entre Dakar et Saint-Louis au Sénégal. Caractérisée par des ressources en eau presque exclusivement souterraines, c’est à la fois la principale zone de production horticole du pays et une source importante d’alimentation en eau potable de la capitale. En outre, les industries extractives ont investi cette région pour exploiter le phosphate et plus récemment le zircon et autres minerais lourds.

La surexploitation avérée des différents aquifères pour ces divers usages induit simultanément une salinisation de l’aquifère profond (par l’intrusion d’eau marine) et une baisse du niveau des nappes phréatiques (estimée à près de 45 cm par an pour l’aquifère profond). Par ailleurs, les activités anthropiques polluent l’aquifère superficiel et entraînent une baisse de la fertilité des sols. Enfin, les hausses de température attendues dans les prochaines décennies et provoquées par le changement climatique, ainsi que la croissance démographique accentueront ces phénomènes, sources de tensions sociales et de risques sanitaire et alimentaire.

Ces perspectives inquiétantes pour l’intégrité et la disponibilité des ressources en eau ont mobilisé la DGPRE du ministère de l’Eau et de l’Assainissement, qui œuvre aujourd’hui activement à la mise en place d’une gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) dans la zone des Niayes.

Le processus engagé avec l’appui du Gret

Le projet de recherche-action porté par le Gret a une visée expérimentale. Il s’agit, dans une dynamique ascendante, de favoriser l’émergence d’une GIRE opérationnelle à l’échelle locale. Une telle expérimentation a pour objectif d’orienter les pouvoirs publics dans l’identification d’instances et d’organisations représentatives des habitant·e·s afin de co-construire avec elles des solutions et des modalités d’actions adaptées au contexte, efficaces et inclusives, dans un contexte de renforcement d’une gouvernance partagée de la ressource entre les populations et les institutions locales et nationales.

À l’échelle de cinq communes, l’équipe du projet a contribué à la structuration de Plateformes locales de l’eau (PLE), arènes de gouvernance communale regroupant les acteurs et actrices du territoire intéressé·e·s par la démarche (agriculteur·rice·s, éleveur·euse·s, associations d’usager·ère·s de l’eau potable, opérateur·rice·s privé·e·s, services techniques de l’État, collectivités territoriales, ONG, chercheur·euse·s, médias, etc.), dont l’objectif est de contribuer à gérer de manière durable, équitable et efficace les ressources en eau de leur territoire. Conjointement à la construction de ses modalités de gouvernance, chaque plateforme a identifié les enjeux liés aux ressources en eau et conçu en fonction, un Plan local de GIRE (PLGIRE), instrument de planification territoriale détaillant les actions à conduire en vue d’améliorer la gestion des ressources en eau et des usages associés.

Des réponses locales aux enjeux des changements climatiques

Largement discutés lors des mises en débat organisées, les changements climatiques et leurs impacts multiples sur les ressources en eau ont été pris en compte dans la conception des Plans locaux de GIRE. Pour répondre à cette problématique, différentes stratégies ont été développées.

Les Plateformes locales de l’eau ont mis en œuvre des solutions techniques permettant de concourir simultanément à l’atténuation et à l’adaptation aux changements climatiques, notamment :

  • en valorisant des pratiques agro-écologiques : initiés aux principes agro-écologiques, certains acteurs des PLE se sont engagés dans de nouvelles pratiques en utilisant des engrais naturels et en mobilisant des techniques de gestion économe en eau ;
  • en développant des dispositifs de protection des sols et du couvert végétal : des aménagements de cordons pierreux ont été installés et des campagnes de reboisement ont été menées par les PLE en vue de limiter le ruissellement, favoriser l’infiltration des eaux de pluie, restaurer les sols et les écosystèmes ainsi que séquestrer du carbone.

Conjuguées à ces réponses techniques, des mesures politiques ont également été discutées. Dans un contexte où les rapports de force socio-économiques prévalent, les Plateformes locales de l’eau ont engagé un travail sur une méthode de partage des ressources en eau, soulevant les questions d’équité et de durabilité. En raisonnant à partir de la disponibilité des ressources – et non plus à partir des besoins –, les PLE se sont aperçues du caractère fini des ressources en eau mais aussi de l’enjeu politique que représente sa répartition.

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