23 juillet 2021
Ressources naturelles Biodiversité Gouvernance partagée Sénégal

3 questions à… Serigne Segnane, partenaire du Festival des forêts au Sénégal

Actualité

Serigne Segnane est chargé de programme sur les questions foncières et les ressources naturelles au sein du Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR), et partenaire du Gret dans le cadre du projet Commun mené depuis fin 2017 en Casamance, dans le sud du Sénégal. Il revient aujourd’hui sur le Festival des Forêts, organisé en juin autour de la préservation durable des forêts.

Un Festival des forêts a été organisé du 24 au 26 juin à Medina Yoro Foulah, en Casamance. Comment est née l’idée de son organisation ?

Le Festival des forêts est une initiative portée par des acteurs locaux et appuyée par le CNCR et le Gret dans le cadre du projet Commun (“Citoyens et organisations locales mobilisés pour un meilleur usage des ressources naturelles”), soutenu par l’Union européenne.

Le département de Médina Yoro Foulah constitue une zone où la forêt est gravement menacée par le trafic de bois à grande échelle. Les feux de brousse ou les défrichements agricoles à outrance effectués par les paysan∙ne∙s à la recherche de terres fertiles sont également responsables de la très forte pression exercée sur la forêt. Selon l’Institut d’études de sécurité (ISS), 10 000 hectares de forêts ont ainsi été perdus en Casamance entre 2010 et 2015.

Pour lutter contre ce fléau, le projet Commun a facilité la mise en place d’une gouvernance forestière participative avec trois axes d’intervention, à savoir : l’éducation environnementale et la veille citoyenne ; l’appui aux initiatives locales visant à améliorer l’état des ressources forestières ; la communication sociale, la capitalisation et le plaidoyer. En parallèle, plusieurs activités ont été menées telles que l’élargissement des commissions environnement des communes, la mise en place de la plateforme départementale de gouvernance forestière, l’élaboration de conventions locales et de mises en défens, ou le financement de groupements d’intérêt économique de femmes et de jeunes pour chercher des activités alternatives à la coupe de bois abusive.

Le Festival des forêts constitue donc l’aboutissement des trois années de mise en œuvre du projet, porté par les habitant∙e∙s de Médina Yoro Foulah, qui ont insisté pour accueillir dans leur propre localité cette troisième édition du festival.

Quels ont été les temps forts de ce festival ?

Ce grand évènement a duré trois jours durant lesquels les participant∙e∙s ont grandement communié autour du slogan « Ma forêt, ma vie ». Des centaines de personnes venues des 11 communes du département, des associations de jeunes, des groupements de femmes, des groupes scolaires, des services techniques de l’administration, des élus locaux, des parlementaires, des acteurs culturels et artistiques ont ainsi pris part au festival. Nous avons noté également l’impact sous-régional de l’évènement, avec la participation d’organisations paysannes membres du Réseau des producteurs agricoles d’Afrique de l’Ouest (ROPPA) venues de Guinée-Bissau, de Gambie et du Burkina Faso.

De plus, ce festival a su joindre l’utile à l’agréable à travers une programmation variée de panels de discussion, de sketchs, de débats et d’activités (foires de produits issus de la forêt, randonnée pédagogique dans une forêt ayant fait l’objet d’une mise en défens, activités culturelles, etc.). Différentes thématiques liées aux enjeux transfrontaliers de gestion de nos forêts, aux responsabilités et droits des communautés dans la gouvernance des forêts au regard du nouveau code forestier ont également été développées. Le festival a par ailleurs permis de faire un retour d’expériences des actions conduites dans le département avec l’appui du projet Commun, avec mettant notamment en avant les témoignages de bénéficiaires du projet.

Enfin, le festival s’est clôturé sur la remise des prix d’un concours autour des thèmes liés à la forêt et à l’environnement, auquel des élèves de l’élémentaire et du lycée ont participé.

Le projet Commun étant arrivé à son terme, quelles sont les perspectives futures pour ce Festival des forêts ?

Ce festival a constitué une bonne tribune pour débattre des enjeux de la gouvernance forestière et des opportunités de valorisation des ressources forestières à différents niveaux, des habitant∙e∙s aux collectivités. L’idée d’organiser la prochaine édition du festival en collaboration avec d’autres pays de la sous-région pour une prise en compte effective de la dimension transfrontalière de gestion des ressources forestières est une perspectives qui est aujourd’hui envisagée.

De plus, il faut aussi noter que la déclaration finale du festival – qui fera l’objet d’un partage auprès des décideurs et partenaires – constitue un bon support de plaidoyer. Cette déclaration enjoint les collectivités territoriales à exercer pleinement les compétences qui leur ont été transférées en matière d’environnement et de gouvernance forestière, et à renforcer la responsabilisation des populations dans la gestion et la protection des forêts.

Le contenu de cet article relève de la seule responsabilité du Gret et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant l’avis de l’Union européenne.

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